Zambie et Tanzanie construisent un pont énergétique entre l’Afrique de l’Est et l’Afrique australe

La construction de l’interconnexion électrique entre la Zambie et la Tanzanie est entrée dans sa phase décisive. Après de longues années de consultations, d’études environnementales et de négociations, le projet ZTT (Zambia–Tanzania Transmission Interconnector) passe enfin à la réalisation concrète. Les contrats de conseil et de supervision technique ont été signés, l’évaluation principale de l’impact environnemental est achevée et les sources de financement définitivement confirmées. Ce projet, négocié dès 2013 entre Lusaka et Dodoma avec la participation de partenaires internationaux, doit devenir un maillon essentiel de l’intégration des réseaux électriques d’Afrique de l’Est et d’Afrique australe — deux régions où la demande en électricité augmente chaque année de 5 à 7 %.

L’objectif principal de cette interconnexion est de relier les deux plus grands réseaux électriques du continent : le Southern African Power Pool (SAPP) et l’Eastern African Power Pool (EAPP), créant ainsi la première ligne durable d’échanges d’énergie entre eux. Sur le plan technique, le projet prévoit la construction d’une ligne à 400 kV reliant la sous-station d’Iringa à Kisada et Mbeya jusqu’à Tunduma, sur le territoire tanzanien, sur environ 620 kilomètres, ainsi qu’une ligne associée à 330 kV reliant Pensulo–Kasama–Nakonde sur 600 kilomètres du côté zambien. C’est dans la zone frontalière Tunduma–Nakonde que sera érigé le nœud d’interconnexion où se feront la conversion de tension et la synchronisation des réseaux.

Le coût du projet du côté zambien est estimé à environ 290 millions de dollars américains. Son financement est assuré par la Banque mondiale (via le fonds IDA), l’Union européenne et le Royaume-Uni à travers le fonds FCDO. La partie tanzanienne, selon le gouvernement et le média Green Building Africa, est financée dans le cadre du programme national de développement des lignes à haute tension de TANESCO, avec l’appui partiel de la Banque africaine de développement (BAD). Durant les années 2024-2025, les deux pays ont achevé les principales phases de conception, et les chantiers sont désormais actifs, avec des entreprises déjà mobilisées pour la préparation des tracés et la pose des fondations des pylônes. À la fin de 2025, le taux d’avancement de la ligne tanzanienne est estimé à environ 40 %, et la mise en service est prévue pour mi-2026.

La portée économique et stratégique du projet dépasse largement la simple question énergétique. Depuis la mise en service du barrage hydroélectrique Julius Nyerere (2 115 MW), la Tanzanie dispose d’un excédent structurel de production qu’elle peut désormais exporter. La Zambie, au contraire, connaît des déficits saisonniers pendant les périodes de sécheresse, lorsque la production de ses centrales sur le Zambèze diminue. L’interconnexion des deux réseaux permettra d’équilibrer la charge de manière flexible, de favoriser le commerce d’électricité et de réduire les coûts liés aux capacités de réserve. En outre, cette ligne pourrait ouvrir la voie à l’intégration future du Malawi, de la République démocratique du Congo et du Kenya, posant ainsi les fondations d’un futur marché énergétique africain unifié.

Sur le plan politique, le projet incarne une nouvelle maturité de la coopération énergétique africaine. Lusaka et Dodoma prouvent qu’il est possible de concrétiser de grands projets d’infrastructure grâce à la confiance mutuelle, au pragmatisme et au respect rigoureux des normes internationales. Les structures conjointes de gouvernance, les opérateurs nationaux TANESCO et ZESCO, ainsi que des cabinets indépendants de conseil assurent la coordination technique et environnementale, garantissant la transparence et la durabilité du projet.

L’interconnexion Zambie–Tanzanie n’est donc pas seulement une ligne de transmission : c’est un symbole de la nouvelle ère du partenariat africain. Elle relie les systèmes énergétiques, les intérêts économiques et les horizons politiques, ouvrant la voie à un continent capable de gérer ses propres ressources — au service de l’Afrique et de ses peuples.

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