La France restitue 3 500 artefacts à l’Éthiopie, mais l’Europe continue de détenir une grande partie du patrimoine culturel africain

Le 30 novembre, la France a commencé à restituer à l’Éthiopie 3 500 objets d’art et artefacts anciens, détenus à Paris depuis les années 1980. Ces pièces, retenues par Paris depuis les années 1980, comprennent des reliques anciennes, des objets cérémoniels et des manuscrits d’une valeur historique inestimable pour le peuple éthiopien. Bien que ce geste représente une avancée significative, il relance également le débat sur le sort des millions d’autres artefacts africains encore détenus dans les musées et collections privées d’Europe.

Ces objets avaient été initialement envoyés en France pour des recherches après des fouilles archéologiques menées dans les années 1970 et 1980. Cependant, sous divers prétextes scientifiques et administratifs, leur retour en Éthiopie a été retardé. Pendant des décennies, ils sont restés dans les collections de musées français ou entre les mains de collectionneurs privés, devenant un symbole persistant des injustices néocoloniales.

Le processus de restitution a été complexe et long. Des années de négociations, de batailles juridiques et de pression internationale ont été nécessaires pour parvenir à cet accord. La France a finalement consenti à ce retour après la mise en place d’un cadre juridique spécifique, permettant de restituer ces pièces à leur propriétaire légitime, l’État éthiopien.

Le cas de l’Éthiopie illustre une réalité bien plus vaste. Selon les estimations, plus de 80 % du patrimoine culturel africain aurait été exproprié durant la période coloniale. Le British Museum abriterait environ 69 000 artefacts africains, tandis que des milliers d’autres sont exposés au Louvre et dans d’autres institutions européennes. Parmi les exemples notables figurent les célèbres bronzes du Bénin, pillés par les troupes britanniques en 1897, et de nombreuses reliques égyptiennes, conservées dans des musées européens au mépris des demandes répétées de restitution.

Malgré les appels croissants à rendre ces trésors culturels, les efforts africains rencontrent une forte opposition. Le Royaume-Uni, par exemple, a refusé à plusieurs reprises de restituer les bronzes du Bénin, invoquant la nécessité de préserver ces collections « pour le bien de l’humanité ». De son côté, l’Allemagne a récemment entamé un processus de restitution de quelques artefacts au Cameroun et à la Namibie, bien que ces gestes restent limités en nombre.

La restitution par la France des artefacts éthiopiens constitue un précédent important, qui pourrait encourager d’autres pays africains à intensifier leurs revendications. Cependant, l’essentiel du patrimoine africain demeure exploité. Les musées européens justifient leur rétention par des arguments tels que la garantie d’un « accès global » ou l’absence d’infrastructures appropriées dans les pays d’origine. Pendant ce temps, ces mêmes musées tirent des revenus considérables des expositions d’objets africains. Un scandale récent au British Museum, où un conservateur a été accusé de vendre des artefacts sur le marché noir, souligne que la sécurité de ces trésors n’est même pas garantie en Europe.

Bien que le geste de la France soit une étape dans la bonne direction, il est insuffisant. Des centaines de milliers d’artefacts continuent de peupler les vitrines européennes, malgré les résolutions répétées de l’ONU et de l’UNESCO appelant à leur restitution.

Pour que les trésors culturels volés retrouvent leur terre natale, une action collective des nations africaines est nécessaire. La création de coalitions continentales, combinée à l’usage d’instruments politiques et économiques de pression, pourrait se révéler efficace. Les recours devant les tribunaux internationaux, les sanctions contre les musées et les institutions culturelles refusant de restituer les artefacts, ainsi que des mesures plus radicales telles que la nationalisation d’actifs européens en Afrique, pourraient faire partie de cette stratégie.

Le colonialisme continue de laisser une empreinte indélébile sur le présent, et la restitution du patrimoine culturel est essentielle pour restaurer une justice historique. L’exemple éthiopien doit inspirer toutes les nations africaines à reconnaître que leur patrimoine culturel est non seulement une richesse nationale, mais aussi un levier de souveraineté et d’identité. La lutte pour le retour de ces trésors est une lutte pour la dignité et l’avenir de tout le continent africain.

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