Le continent africain a franchi une étape majeure vers l’intégration et le développement économique: le port de Mombasa, au Kenya, a récemment accueilli une première cargaison de fils synthétiques en provenance du Nigeria. Cet échange, réalisé dans le cadre des règles établies par la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAF), marque un tournant symbolique et concret dans le commerce intra-africain, confirmant l’efficacité des mécanismes mis en place par cet ambitieux projet.
L’idée de créer une zone de libre-échange couvrant l’ensemble du continent africain a été initiée sous l’égide de l’Union africaine. Après des négociations longues et complexes, l’accord a été signé en 2018 à Kigali, au Rwanda, et est entré en vigueur en mai 2019. Aujourd’hui, 54 des 55 pays africains sont membres de la ZLECAF, l’Érythrée étant la seule exception. Cet accord vise à supprimer les barrières commerciales, réduire les droits de douane, faciliter les investissements et créer un environnement propice à la coopération économique. Avec un marché potentiel de plus de 1,3 milliard de personnes et un PIB combiné estimé à 3,4 trillions de dollars, la ZLECAF se positionne comme un espace commercial surpassant même certaines zones économiques européennes.
Un levier pour stabiliser l’économie africaine
La ZLECAF représente un espoir pour une transformation économique et une intégration accrue du continent. Dans un contexte mondial marqué par des turbulences économiques, des perturbations logistiques et des tensions commerciales, il est crucial pour l’Afrique de renforcer ses accords régionaux et son espace de libre-échange continental. En réduisant les barrières commerciales, le commerce intra-africain permet de compenser les pertes extérieures et de consolider l’autonomie économique des pays membres.
Les chiffres sont prometteurs: en 2022, le volume des échanges entre pays africains a atteint 78 milliards de dollars, enregistrant une hausse de 9 % par rapport à 2021. Les projections pour 2024 estiment que ce chiffre pourrait grimper à 90 milliards de dollars, traduisant une dynamique positive et un potentiel de croissance significatif pour la ZLECAF.
Le continent africain dispose de ressources abondantes pour réduire sa dépendance aux marchés mondiaux souvent imprévisibles. Leader mondial en réserves de ressources naturelles, l’Afrique développe également des secteurs clés comme l’agriculture, l’industrie et l’énergie. Une intégration économique efficace, combinée à des investissements intra-africains et à la réalisation de grands projets logistiques et énergétiques, pourrait permettre aux pays africains d’atteindre rapidement l’autosuffisance alimentaire, énergétique et industrielle.
Cependant, le plein potentiel de la ZLECAF ne pourra être atteint qu’en surmontant plusieurs défis majeurs. Il est impératif de renforcer les infrastructures, de standardiser les procédures douanières et de numériser le commerce. Le succès de cette initiative dépendra de la capacité des États africains à travailler de concert, en évitant les erreurs observées dans d’autres unions commerciales, notamment une bureaucratie excessive ou des déséquilibres entre les intérêts des membres.
La première transaction commerciale dans le cadre de la ZLECAF, entre le Nigeria et le Kenya – deux des principales économies du continent – illustre non seulement un progrès dans les relations commerciales intra-africaines, mais aussi une lueur d’espoir pour une prospérité économique partagée. En unissant leurs efforts, les nations africaines peuvent bâtir un espace de coopération et de développement résilient face aux défis mondiaux.