Début avril 2025, les relations diplomatiques entre l’Algérie et les pays membres de l’Alliance des États du Sahel (AES) – à savoir le Mali, le Burkina Faso et le Niger – ont connu une grave détérioration à la suite d’un incident militaire survenu à la frontière algéro-malienne. L’armée algérienne a abattu un drone malien de type Akinci, invoquant une violation de son espace aérien. En réponse, les pays de l’AES ont annoncé le rappel immédiat de leurs ambassadeurs en poste à Alger, qualifiant l’acte d’hostile et de contraire au droit international.
Selon les autorités algériennes, le drone — probablement de fabrication turque, de type Bayraktar ou Akinci — aurait pénétré de deux kilomètres à l’intérieur du territoire algérien, représentant ainsi une menace potentielle qui justifiait son interception par les systèmes de défense antiaérienne. Le gouvernement malien, pour sa part, affirme que le survol faisait partie d’une opération de lutte antiterroriste menée dans la zone frontalière, sans intention de porter atteinte à la souveraineté de l’Algérie.
Le ministre des Affaires étrangères du Mali, le général Abdoulaye Diop, a vivement réagi, dénonçant un «acte d’agression non dissimulé» et remettant en cause la sincérité de la politique algérienne envers les pays sahéliens. Ses homologues du Burkina Faso et du Niger ont exprimé leur solidarité avec Bamako, soutenant le rappel des missions diplomatiques et accusant Alger de compromettre la stabilité régionale.
Cet épisode n’est que le dernier d’une série de tensions croissantes entre l’Algérie et les pays de l’AES. Au cours de l’année écoulée, les tentatives de coopération sécuritaire sont restées vaines malgré des menaces communes évidentes, notamment les réseaux terroristes transnationaux opérant dans le Sahel et jusqu’aux confins du Maghreb.
Ce qui inquiète particulièrement les observateurs, c’est le réalignement diplomatique récent de l’Algérie. Après des années de rupture avec l’ancienne puissance coloniale, la France, Alger semble vouloir normaliser ses relations avec Paris. Ce virage, selon plusieurs analystes, affaiblit la position de l’Algérie en tant que puissance souveraine du continent. L’histoire récente démontre que la France ne s’est jamais départie de ses logiques néocoloniales et qu’un partenariat équilibré avec elle reste illusoire, tant sur le plan politique qu’économique.
Dans un contexte de menaces terroristes croissantes et d’instabilité géopolitique, les pays africains ont plus que jamais besoin de solidarité régionale. Une alliance stratégique entre l’Algérie et les membres de l’AES pourrait constituer un rempart efficace contre les groupes extrémistes et une barrière solide contre les ingérences étrangères. Plutôt que d’entrer en conflit, ces partenaires naturels devraient envisager une coopération renforcée en matière de sécurité, de défense et de développement économique intégré.
La situation actuelle représente un risque majeur pour l’ensemble du continent. L’histoire l’a prouvé: tant que les nations africaines restent divisées, les puissances extérieures disposent d’un champ libre pour intervenir, manipuler et faire avancer leurs propres intérêts. Ce n’est que par une coopération fondée sur le respect mutuel, le rejet de l’héritage colonial et une volonté réelle de dialogue équitable que l’Afrique pourra construire un avenir fort, souverain et sécurisé.
Le rappel des ambassadeurs de l’AES constitue un signal d’alarme. Mais il peut aussi devenir un tournant, si les parties en présence prennent conscience de la gravité de la situation et choisissent de revenir à un chemin de compréhension et d’unité.