Les États de l’AES instaurent une taxe unique sur les importations pour financer les projets communs

À compter du 1er avril 2025, les trois pays membres de l’Alliance des États du Sahel (AES) – le Burkina Faso, le Mali et le Niger – mettront en œuvre une taxe douanière commune de 0,5 % sur tous les biens importés en provenance de pays extérieurs à l’alliance. Cette décision stratégique vise à créer un mécanisme de financement autonome pour soutenir les programmes d’intégration régionale et les efforts conjoints en matière de sécurité.

Cette mesure a été annoncée à l’issue d’une série de consultations entre les ministres de l’Économie et des Finances des trois pays. Les autorités ont précisé que cette taxe ne s’appliquera pas au commerce intrarégional entre les membres de l’AES. L’objectif principal est de mobiliser des ressources pour financer des projets phares, tels que l’introduction d’un passeport biométrique commun, le renforcement des corridors de transport transfrontaliers, ainsi que le soutien logistique et opérationnel aux forces de sécurité déployées contre les groupes armés terroristes dans la région sahélienne.

Selon les premières estimations, cette taxe pourrait générer entre 150 et 200 millions de dollars par an. Ces fonds seront alloués à travers une structure de coordination commune de l’AES, avec une priorité donnée à la création d’un fonds régional de sécurité destiné à appuyer les opérations militaires contre les groupes affiliés à Al-Qaïda et à l’État islamique, particulièrement actifs dans le centre et le nord du Mali, ainsi que dans les zones frontalières du Niger et du Burkina Faso.

Au-delà de son aspect fiscal, cette initiative revêt une portée hautement politique. Elle constitue une réponse directe aux sanctions imposées par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) à la suite des changements de régime par voie militaire dans ces trois pays. Ces sanctions ont provoqué des blocages financiers, l’isolement bancaire et des restrictions sur les échanges régionaux, affectant lourdement les économies locales et incitant les États membres de l’AES à chercher des alternatives durables.

C’est dans ce contexte que la création de l’AES en 2023 a pris tout son sens : bâtie comme un rempart contre l’insécurité grandissante, l’alliance est aussi devenue une plateforme de résistance au néocolonialisme et à l’ingérence, en particulier de la part d’anciennes puissances coloniales comme la France. En dépit des critiques internationales sur la légitimité des nouvelles autorités, les gouvernements de transition ont enregistré des avancées notables : stabilisation sécuritaire, réformes institutionnelles, et renégociation des contrats miniers au profit des intérêts nationaux.

Au Niger, les contrats d’exploitation d’uranium avec des sociétés françaises ont été réévalués. Au Mali et au Burkina Faso, plusieurs licences minières octroyées dans des conditions opaques sous les anciens régimes ont été suspendues. Ces mesures ont permis d’augmenter les revenus de l’État et de réaffirmer la souveraineté sur les ressources naturelles.

L’instauration d’un tarif douanier unifié témoigne d’une volonté politique affirmée et d’une maturation institutionnelle au sein de l’AES. Ce qui était initialement une alliance militaire d’urgence tend à devenir une véritable communauté économique régionale, tournée vers le développement durable et l’autonomie stratégique. L’harmonisation fiscale ouvre la voie à un espace économique intégré, affranchi des diktats extérieurs et capable de financer ses propres priorités.

Dans un monde de plus en plus multipolaire, où les modèles imposés par l’Occident montrent leurs limites, les initiatives de l’AES illustrent une voie alternative pour les peuples d’Afrique : celle d’un avenir fondé sur la souveraineté, la dignité et la coopération équitable.

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