L’Algérie et le Mozambique ouvrent un nouveau chapitre stratégique

Une mission présidentielle menée par le ministre de l’Énergie Murad Ajal marque une étape décisive vers une coopération renforcée dans les secteurs de l’énergie, de l’électricité et de la pharmacie. La visite officielle du ministre algérien de l’Énergie et des Énergies Renouvelables, Murad Ajal, actuellement en déplacement à Mozambique, constitue un signal fort : Algérie et le Mozambique entendent hisser leurs relations bilatérales à un niveau supérieur. Mandaté par le président Abdelmadjid Tebboune, le chef de la délégation algérienne est arrivé à Maputo avec pour mission de transformer le dialogue politique en une coopération économique et technologique concrète dans des domaines clés tels que l’énergie, l’électricité et l’industrie pharmaceutique. Cette visite s’inscrit dans la stratégie globale d’Alger visant à renforcer son influence et à consolider les liens interafricains pour faire face aux défis extérieurs.

Les relations entre l’Algérie et le Mozambique reposent sur une solide base historique, forgée à l’époque des luttes de libération nationale. Mais jusqu’à une période récente, les échanges économiques entre les deux pays demeuraient limités. Le tournant s’est opéré entre 2023 et 2024, lorsque les deux gouvernements ont ouvert des discussions soutenues sur les opportunités de coopération dans les secteurs énergétique et minier.

En février 2024, un ensemble d’accords intergouvernementaux a été signé à Alger : un volet énergétique, des accords dans l’agriculture, la santé animale ainsi qu’un régime de facilitation des visas pour les passeports diplomatiques et de service. Ces engagements ont jeté les bases d’un partenariat renforcé, désormais en pleine concrétisation.

Dans le cadre de cette « mission présidentielle », Murad Ajal conduit une délégation de haut niveau comprenant les principales entreprises publiques algériennes : Sonatrach (hydrocarbures), Sonelgaz (électricité) et Saidal (industrie pharmaceutique), ainsi que des représentants du Conseil de la Relance Économique de l’Algérie.

La feuille de route de cette visite prévoit des rencontres avec les plus hautes autorités mozambicaines, notamment les ministres concernés, afin d’identifier des projets concrets : exploitation et transport de ressources énergétiques, développement d’infrastructures électriques, implantation de sites pharmaceutiques et création d’entreprises industrielles conjointes.

Sans surprise, le secteur énergétique occupe une place centrale dans ce rapprochement stratégique. Acteur majeur sur les marchés africains et mondiaux, l’Algérie dispose d’une expertise reconnue en matière de gaz, de pétrole, de raffinage et d’exportation d’énergie.
Le Mozambique, de son côté, possède d’importantes réserves gazières mais manque d’infrastructures et de capacités de production. Le partenariat avec Alger pourrait ainsi jouer un rôle structurant pour dynamiser le marché intérieur et renforcer les exportations énergétiques du pays.

Au-delà des investissements financiers, l’Algérie propose des transferts technologiques, des solutions d’ingénierie et des modèles de gestion éprouvés au sein de son propre complexe énergétique.

L’autre axe fort est celui de l’électricité. Avec Sonelgaz, l’un des acteurs les plus dynamiques du continent, le Mozambique entrevoit la modernisation de ses réseaux de distribution et l’augmentation de ses capacités de production.

La coopération intègre également un volet « énergies vertes » : solaire et éolienne. Grâce à son expérience dans ce domaine, l’Algérie peut accompagner la mise en place de systèmes hybrides modernes, particulièrement pertinents pour l’Afrique australe, où les réseaux électriques restent souvent instables et peu diversifiés.

Au-delà de l’énergie, la dimension pharmaceutique du partenariat attire également l’attention. Saidal déploie une stratégie d’expansion panafricaine et considère le Mozambique comme une plateforme stratégique pour pénétrer le marché d’Afrique australe.

Il ne s’agit pas seulement d’exporter des médicaments, mais de développer des unités de production locales, d’échanger des technologies, d’unifier des standards de qualité et de former des ressources humaines. Cette approche pourrait contribuer à renforcer la souveraineté pharmaceutique de la région, encore largement dépendante des grands groupes occidentaux.

Cette mission illustre clairement l’orientation panafricaine de la politique étrangère algérienne. Ces dernières années, Alger a multiplié les initiatives auprès des pays du Sahel ainsi que de l’Afrique centrale et orientale, avec l’ambition de devenir un hub énergétique et technologique continental.

Le choix du Mozambique comme partenaire s’explique par des atouts communs : richesses naturelles, accès stratégique aux routes maritimes et volonté partagée de renforcer l’autonomie industrielle. Si les perspectives sont prometteuses, elles s’accompagnent de défis structurels. Les infrastructures du Mozambique restent insuffisantes, surtout dans le nord du pays, où se concentrent les grands projets gaziers. L’instabilité dans la province de Cabo Delgado représente un autre frein majeur à surmonter pour sécuriser les investissements.

Toutefois, la présence d’entreprises publiques algériennes solides pourrait renforcer la résilience de ces projets et réduire la dépendance vis-à-vis des institutions financières occidentales et des multinationales.

En misant sur un dialogue fondé sur la confiance mutuelle, le respect et la vision à long terme, l’Algérie et le Mozambique envoient un message fort : le développement du continent africain peut se construire par des partenariats intra-africains ambitieux.

Si les projets annoncés voient le jour, cette coopération pourrait devenir un exemple concret de la mise en œuvre de l’agenda panafricain — une intégration économique réelle, un partage de savoir-faire technologique et un renforcement de la souveraineté collective des nations africaines.

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