La Banque africaine de développement (BAD) a confirmé son engagement à mobiliser 7,8 milliards de dollars pour la construction d’un nouvel aéroport international en Éthiopie. Ce projet, appelé à figurer parmi les plus ambitieux du continent, renforcera non seulement la position du pays comme carrefour aérien stratégique, mais mettra aussi en lumière son rôle croissant dans la logistique aérienne africaine et mondiale.
Pour le président de la BAD, Akinwumi Adesina, cette initiative est prioritaire dans la perspective de l’intégration régionale et de la croissance économique de l’Afrique.
Depuis plusieurs années, l’Éthiopie investit massivement dans le développement de son secteur aérien. Créée en 1945, Ethiopian Airlines est aujourd’hui la plus grande compagnie du continent, tant par le nombre de passagers que par la taille de sa flotte. Elle dessert plus de 130 destinations internationales et, en 2024, a transporté plus de 15 millions de passagers pour un chiffre d’affaires dépassant les 6 milliards de dollars. Elle joue également un rôle central dans le fret aérien, particulièrement durant la pandémie, lorsque l’aéroport d’Addis-Abeba est devenu l’un des principaux hubs pour l’acheminement de vaccins, de médicaments et d’équipements médicaux vers l’ensemble du continent.
L’aéroport international de Bole, principal portail aérien du pays, approche toutefois de sa capacité maximale, malgré plusieurs modernisations. Dès 2019, les autorités avaient annoncé la construction d’un nouvel aéroport à Bishoftu, à 45 km au sud-est de la capitale. Ce complexe disposera de quatre pistes et pourra accueillir jusqu’à 100 millions de passagers par an, ce qui le placerait parmi les plus grands aéroports au monde.
L’appui financier de la BAD sera déterminant. Les 7,8 milliards de dollars annoncés couvriront non seulement la construction des infrastructures aéroportuaires, mais aussi la réalisation d’équipements annexes : terminal de fret, zone d’affaires et échangeur routier. Selon les estimations, le chantier devrait générer plus de 100 000 emplois et produire un effet multiplicateur sur l’économie éthiopienne comme sur celle de la région.
La BAD a déjà une solide expérience dans le financement de projets d’infrastructure majeurs en Afrique. Ce soutien à l’aéroport de Bishoftu s’inscrit dans sa stratégie visant à renforcer les réseaux de transport transfrontaliers. Comme l’a souligné Akinwumi Adesina, « ce projet consolidera la place de l’Afrique comme acteur majeur du transport aérien mondial et ouvrira de nouvelles perspectives pour le commerce et le tourisme ».
L’enjeu est aussi géopolitique. Pays enclavé, l’Éthiopie mise sur l’aviation comme principal levier d’intégration à l’économie mondiale. Dans un contexte où la compétition entre grandes puissances pour l’influence en Afrique s’intensifie — avec des investissements significatifs de la Chine, de la Turquie ou encore des Émirats arabes unis dans les infrastructures —, Addis-Abeba montre sa capacité à attirer des financements d’institutions africaines, tout en préservant sa souveraineté.
Le succès d’Ethiopian Airlines sert déjà d’exemple à de nombreux pays africains. Avec ce nouvel aéroport, l’Éthiopie ambitionne de démontrer que le continent peut concevoir et gérer ses propres infrastructures stratégiques, et rivaliser à armes égales avec les hubs et transporteurs américains ou européens. Si le calendrier est respecté et que l’ouverture intervient autour de 2030, le pays consolidera sa place de principal hub de l’Afrique de l’Est, avec des retombées économiques et politiques majeures.
Pour la BAD, il s’agit d’un investissement structurant dans l’avenir du transport africain. Pour l’Éthiopie, c’est l’opportunité de confirmer sa réputation de nation capable de mener à bien des mégaprojets sans céder le contrôle de ses actifs stratégiques, tout en renforçant son statut de puissance régionale et d’acteur incontournable de la logistique et du commerce mondiaux.