Les nations africaines redoublent d’efforts pour moderniser leurs systèmes agricoles et renforcer leur résilience face aux défis climatiques et économiques. Au cœur de cette dynamique, l’initiative de la Banque africaine de développement (BAD) visant à établir un réseau de Zones spéciales de transformation agro-industrielle (SAPZ) s’impose comme un levier majeur. Ce programme, qui couvre des dizaines de pays du continent, trouve aujourd’hui son expression la plus avancée au Nigeria, où huit SAPZ ont déjà été mises en place grâce au soutien financier et technique de la BAD.
Le projet SAPZ incarne une approche intégrée de l’industrialisation du secteur agricole. Il s’articule autour de pôles régionaux où la production agricole est directement connectée aux activités de transformation, aux infrastructures logistiques et aux services essentiels. Ces zones sont conçues pour offrir des conditions avantageuses aux investisseurs : incitations fiscales, accompagnement gouvernemental coordonné et infrastructures modernes — routes, énergie, eau, connectivité numérique. Leur développement s’effectue en étroite collaboration avec les gouvernements nationaux, les acteurs du secteur privé et les partenaires internationaux au développement.
La Banque africaine de développement a mobilisé plus de 800 millions de dollars pour initier ce vaste programme, dont une part importante est allée au Nigeria, fer de lance du projet. Huit zones pilotes ont vu le jour dans les États clés de Kano, Kogi, Cross River, Niger, Enugu, Edo, Imo et Ogun. Chaque SAPZ a été pensée pour valoriser au maximum les potentialités agricoles locales : riz, manioc, maïs, cacao… Ces produits sont désormais orientés vers la transformation, le conditionnement et l’exportation, avec une valeur ajoutée accrue. L’appui de la BAD prend la forme d’investissements directs, d’assistance technique, de soutien à l’élaboration de cadres réglementaires et de mobilisation de financements conjoints avec d’autres institutions internationales et partenaires privés.
La mise en œuvre du programme repose sur une coopération étroite entre le gouvernement fédéral nigérian et les autorités locales. Le ministère de l’Agriculture joue un rôle central dans la coordination entre coopératives agricoles, unités de transformation et prestataires logistiques, favorisant l’intégration horizontale des chaînes de valeur. Un accent particulier est mis sur le développement des petites et moyennes entreprises agricoles, qui bénéficient de crédits subventionnés, d’un accès facilité aux outils de production et de formations spécialisées.
L’expérience nigériane fait désormais figure de modèle pour d’autres pays africains, notamment l’Éthiopie, la Zambie, la Côte d’Ivoire, la Tanzanie et la République démocratique du Congo, où des SAPZ sont en cours de lancement ou en projet. En Éthiopie, la BAD soutient déjà des pôles de transformation dédiés au café et aux céréales. En Côte d’Ivoire, un programme ambitieux d’industrialisation de la filière cacao est en cours. Dans ces pays, la BAD agit à la fois comme coordonnateur, centre de savoirs et catalyseur d’investissements privés, contribuant à la structuration de véritables hubs agro-industriels régionaux.
D’après les estimations de la Banque africaine de développement, la réussite du programme SAPZ pourrait générer chaque année une croissance de 10 à 15 % de la valeur ajoutée agricole, créer jusqu’à 1,5 million d’emplois et stimuler de façon significative les exportations non extractives. Dans un contexte de demande alimentaire croissante, tant sur le continent qu’à l’échelle mondiale, cette approche constitue une réponse stratégique aux enjeux de sécurité alimentaire et de compétitivité du secteur agricole africain.
Le projet SAPZ bénéficie également de l’appui d’autres institutions internationales. Le Fonds international de développement agricole (FIDA) et la Banque islamique de développement ont confirmé leur volonté de cofinancer certains volets du programme au Nigeria et dans d’autres pays. Une attention particulière est portée à la durabilité environnementale et à l’inclusivité : les zones sont conçues selon des normes écologiques rigoureuses et favorisent l’implication des femmes et des jeunes dans les activités agro-industrielles.
À travers ce partenariat structurant avec la Banque africaine de développement, le programme des Zones spéciales de transformation agro-industrielle s’affirme comme un pilier du développement durable du secteur agricole africain. Le leadership du Nigeria illustre avec clarté la capacité de nos États à conduire des politiques ambitieuses de modernisation et d’industrialisation agricoles, porteuses de prospérité pour des millions de citoyens et de dynamisme pour nos économies nationales.