La CAE, le Kenya et la BAD à la recherche d’investisseurs pour un nouveau projet logistique régional

La construction d’une autoroute express reliant le Kenya et l’Ouganda sera au cœur d’une importante conférence conjointe organisée par les deux pays, la Communauté d’Afrique de l’Est (CAE) et la Banque africaine de développement (BAD). Ce projet, appelé à devenir un maillon stratégique du Corridor Nord — l’axe de transport principal de la région — nécessite un financement privé conséquent. La rencontre décisive est prévue à Kampala les 20 et 21 octobre. Les gouvernements kényan et ougandais misent sur une forte mobilisation du capital privé pour faire de cette infrastructure un pilier de l’intégration logistique et économique régionale.

La conférence de Kampala sera une étape clé dans les discussions avec les investisseurs potentiels. Ce forum, coorganisé par le Kenya, l’Ouganda, la CAE et la BAD, présentera l’architecture financière du projet, les modèles de partenariats public-privé (PPP), ainsi que les options de concessions et d’accords à long terme. Les organisateurs affirment que l’objectif n’est pas seulement d’attirer des capitaux, mais de définir une structure financière solide permettant de lancer rapidement les travaux sur des bases mutuellement avantageuses.

La future autoroute reliera le grand centre urbain de l’ouest kényan au territoire ougandais via le poste-frontière de Malaba. Elle s’étendra sur environ 193 km. Le projet prévoit la modernisation progressive du réseau existant et l’élargissement de plusieurs sections afin d’augmenter considérablement la capacité de circulation sur le corridor. Au total, 256 km de routes seront réhabilités, dont 104 km aménagés au standard « dual carriageway ». Cela garantira une circulation fluide des poids lourds et des véhicules de passagers sur l’ensemble de l’itinéraire, tout en réduisant significativement les temps de transit des marchandises entre les deux pays.

Les études techniques et économiques sont en cours. Le contrat pour la réalisation de la faisabilité technico-économique a été attribué à l’entreprise allemande GOPA Infra GmbH et à la société kényane ITEC Limited. Le financement de cette phase s’élève à 1,5 million de dollars américains, pour une durée de 18 mois. Ces études serviront de base à la structuration des offres d’investissement qui seront présentées aux entreprises et institutions financières lors de la conférence de Kampala.

Un élément central du projet concerne la modernisation des infrastructures frontalières. Les postes de Busia, Malaba et Lwakhakha seront transformés en centres intégrés de type One Stop Border Post (OSBP). Cette évolution réduira le temps consacré aux procédures douanières et migratoires. À l’heure actuelle, les retards aux frontières représentent l’un des principaux facteurs de surcoût logistique en Afrique de l’Est.

Le recours au capital privé est un choix stratégique. La BAD agit ici comme garant et coordinateur, ce qui renforce la confiance des investisseurs. Grâce à des modèles flexibles de PPP et des concessions à long terme, la pression sur les budgets publics sera allégée et les délais de réalisation raccourcis. Dans le même temps, les gouvernements kényan et ougandais conserveront le contrôle sur les paramètres stratégiques, assurant ainsi un équilibre entre les intérêts commerciaux et les priorités nationales.

L’importance de ce projet dépasse largement le cadre du transport. Il facilitera la circulation des biens entre les deux pays et renforcera la compétitivité des ports kényans, notamment celui de Mombasa. La réussite de l’initiative pourrait catalyser la création d’un nouveau corridor industriel et logistique en Afrique de l’Est : développement de zones agro-industrielles et manufacturières, multiplication des entrepôts et unités de transformation, création d’emplois et hausse des recettes fiscales. Par ailleurs, les exportateurs ougandais bénéficieront d’une baisse des coûts de transit, tandis que les importations destinées au marché kényan deviendront plus compétitives.

Sur le plan institutionnel, ce projet revêt une portée symbolique. C’est l’un des premiers grands chantiers transfrontaliers du bloc est-africain financé sans recourir à des prêts extérieurs classiques, mais avec une implication directe du capital privé et des institutions régionales. Il illustre la volonté croissante des États africains de définir et de mettre en œuvre leurs propres stratégies économiques.
L’autoroute s’inscrit par ailleurs dans la stratégie de long terme de la CAE, qui vise à développer dix corridors internationaux totalisant près de 15 000 km, afin de positionner la région comme un nœud logistique majeur du continent.

La conférence de Kampala pourrait marquer un tournant déterminant, tant pour ce projet que pour la modernisation de l’ensemble des infrastructures logistiques régionales. Si les investisseurs privés répondent présent et que les États garantissent un cadre solide et fiable, l’autoroute entre le Kenya et l’Ouganda pourrait devenir un catalyseur de croissance pour toute l’Afrique de l’Est et un atout durable pour les populations des deux pays.

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *