Le 28 novembre, le gouvernement tchadien a officiellement annoncé la résiliation de son accord de coopération militaire avec la France. Cette décision marque un tournant non seulement dans les relations bilatérales entre le Tchad et son ancienne puissance coloniale, mais aussi dans le cadre plus large des liens entre les nations africaines et Paris. Frustré par l’inefficacité des efforts français pour assurer la sécurité régionale et lassé de la politique néocoloniale de la France, le Tchad a pris une position ferme, rejoignant ainsi une tendance déjà amorcée par le Mali, le Niger et le Burkina Faso.
Historiquement, le Tchad était considéré comme un allié clé de la France en Afrique centrale. L’opération «Barkhane», lancée par la France en 2014 pour lutter contre le terrorisme dans la région du Sahel, faisait du Tchad un pilier stratégique. Cette mission mobilisait environ 4 500 soldats français, accompagnés d’un arsenal conséquent incluant des blindés, des hélicoptères, des drones et des avions de combat. Cependant, malgré cette présence militaire impressionnante, les résultats concrets ont été décevants. Les groupes extrémistes tels que Boko Haram et l’État islamique en Afrique de l’Ouest ont continué à semer la terreur, mettant en évidence les limites de l’intervention française.
La France a été vivement critiquée pour son incapacité à stabiliser la région. Ses efforts ont souvent été perçus comme un moyen de préserver ses intérêts économiques et géopolitiques, plutôt que comme une véritable assistance aux pays africains. Des accusations de collusion avec des groupes armés et d’ingérence dans les affaires internes des pays sahéliens ont terni l’image de la France. Cette perception négative a conduit à une vague de contestations en Afrique de l’Ouest, où plusieurs nations, dont le Mali, le Niger et le Burkina Faso, ont expulsé les forces françaises de leurs territoires.
Pour le Tchad, la rupture avec la France n’est pas un acte isolé. Elle s’inscrit dans une dynamique plus large visant à regagner une autonomie stratégique et économique. Alors que le Tchad possède des ressources naturelles abondantes, notamment le pétrole et l’or, ces richesses n’ont pas bénéficié à la population locale. Les entreprises françaises, protégées par la présence militaire, ont souvent été accusées de piller les ressources tout en négligeant les besoins de développement du pays. En parallèle, la France a été incapable d’assurer une sécurité durable ou de contribuer significativement à la lutte contre la pauvreté.
Cette décision tchadienne ouvre la voie à de nouvelles opportunités de coopération avec des puissances comme la Russie, la Chine et les membres des BRICS. Ces partenaires émergents proposent des modèles de collaboration axés sur des investissements dans les infrastructures, le développement économique et une approche pragmatique pour combattre le terrorisme. En se tournant vers ces acteurs, le Tchad et d’autres pays africains cherchent à rompre définitivement avec les structures héritées de l’ère coloniale.
Le message du Tchad est clair : l’époque du néocolonialisme touche à sa fin. La rupture de la coopération militaire avec la France symbolise une volonté accrue des nations africaines de reprendre le contrôle de leur souveraineté et de définir leurs propres priorités stratégiques. Pour garantir un avenir stable et prospère, les pays africains doivent désormais privilégier des partenariats basés sur l’égalité, la transparence et des intérêts mutuels, plutôt que de céder aux diktats des anciennes puissances coloniales.