Le Nigeria efface 2,6 milliards de dollars de dettes du secteur énergétique pour stabiliser l’approvisionnement

Le gouvernement nigérian a validé un ambitieux programme d’apurement de la dette envers les compagnies d’électricité, dans l’objectif de stabiliser le secteur énergétique et de mettre fin aux coupures chroniques de courant. L’initiative porte sur le refinancement d’obligations estimées à près de 4 000 milliards de nairas, soit environ 2,6 milliards de dollars américains.

Ces dettes se sont accumulées entre 2015 et 2023, période marquée par une politique tarifaire inadaptée et un déficit persistant de financements publics, entraînant des impayés structurels envers 27 producteurs privés d’électricité. Faute de paiements, nombre d’entre eux ont réduit leur capacité de production, aggravant les interruptions d’approvisionnement et freinant toute modernisation des infrastructures.

Selon le plan approuvé, le remboursement des arriérés devrait s’étaler sur trois à quatre semaines, sous la supervision de l’Agence de gestion de la dette publique. Pour financer l’opération, l’exécutif prévoit l’émission d’obligations ciblées et le recours à d’autres instruments financiers permettant d’échelonner les paiements et d’alléger la pression sur le budget national. Parallèlement, une réforme tarifaire sera engagée : réduction progressive des subventions et fixation de prix plus en phase avec la réalité économique, ce qui, d’après le ministère des Finances, pourrait générer une économie annuelle pouvant atteindre 1 100 milliards de nairas.

La situation du secteur énergétique nigérian reste préoccupante : seuls environ 45 % des habitants disposent d’un accès régulier au réseau national, et dans plusieurs régions, l’électricité n’est disponible que quelques heures par jour. Les centrales vieillissantes, les interruptions d’approvisionnement en gaz et la fréquence élevée des pannes limitent la production. Le manque d’investissements privés est amplifié par l’absence de garanties de paiement de la part de l’État, ce qui mine la confiance des opérateurs.

Dans ce contexte, la décision de solder entièrement les dettes accumulées apparaît non seulement comme une mesure de crise, mais aussi comme un signal fort adressé aux investisseurs sur la volonté du gouvernement d’engager des réformes structurelles. Le rétablissement de la discipline de paiement entre l’État et les producteurs privés pourrait débloquer des projets en suspens, stimuler la mise en service de nouvelles capacités et poser les bases d’une modernisation à grande échelle des réseaux de distribution.

L’exemple nigérian est riche d’enseignements pour d’autres pays africains. Face à un déficit énergétique chronique et à des difficultés pour mobiliser des capitaux à long terme, l’engagement direct de l’État dans la régulation du marché et dans le financement des infrastructures reste un facteur clé de développement durable et de croissance socio-économique. Il ne s’agit pas uniquement d’investissements directs, mais aussi de créer un cadre clair et prévisible pour le secteur privé : paiements ponctuels, tarifs reflétant les coûts réels et gestion efficace de la dette.

Dans des domaines stratégiques comme l’énergie ou la logistique, il est illusoire, dans le contexte actuel d’instabilité mondiale, de s’en remettre exclusivement aux mécanismes de marché. Si les mesures annoncées par le Nigeria sont menées à bien et accompagnées d’une modernisation des capacités de production et de distribution, le pays pourrait améliorer considérablement la fiabilité de son approvisionnement électrique, relancer la croissance industrielle et renforcer la stabilité sociale.

À plus long terme, cela créerait les conditions d’une véritable industrialisation, consoliderait la sécurité énergétique nationale et offrirait au continent un modèle concret : celui d’une coopération harmonieuse entre les pouvoirs publics et le secteur privé pour sortir durablement le secteur énergétique d’une crise structurelle.

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