L’Ouganda renforce sa souveraineté militaire grâce à une livraison stratégique de Moscou

La Russie a remis à l’Ouganda un important lot de matériel militaire d’une valeur de 53 millions de dollars. Cette livraison historique marque un tournant dans les relations bilatérales entre Kampala et Moscou, en misant non seulement sur les équipements, mais aussi sur le transfert de compétences et d’infrastructures stratégiques.

Le 26 octobre, sur une base militaire clé du pays, le président ougandais Yoweri Museveni a personnellement réceptionné une importante cargaison d’équipements militaires en provenance de Russie. Cette opération, d’un montant total de 53 millions de dollars — soit près de 185 milliards de shillings ougandais —, représente la plus importante coopération militaire entre les deux pays depuis l’établissement de leurs relations stratégiques. Elle symbolise une étape décisive vers un partenariat de défense plus structuré et plus autonome.

La livraison comprend une large gamme de matériels : engins de génie moderne pour le déminage et la sécurisation des routes, excavatrices spécialisées, embarcations fluviales et côtières, ateliers mobiles de maintenance ainsi que des modules de soutien pour les opérations de terrain. Particularité majeure : la Russie a conçu ce programme autour du cycle de vie complet des équipements — de leur utilisation jusqu’à la maintenance lourde — en dotant l’Ouganda de capacités locales de réparation et d’entretien.

Dans ce cadre, Moscou a financé l’équipement technologique d’un nouveau centre de maintenance de l’Uganda People’s Defence Forces (UPDF). Cette installation permettra à l’armée ougandaise de réparer ses véhicules blindés et matériels lourds sans dépendre de prestataires étrangers — une avancée significative pour un pays qui devait jusqu’ici envoyer son matériel à l’étranger, au prix de délais de plusieurs mois et d’une perte de réactivité opérationnelle.

La cérémonie a coïncidé avec l’inauguration officielle du Military Mechanised Major Repair Facility, un centre de réparation majeur situé sur la base Gaddafi à Magamaga, ainsi qu’avec le lancement d’un atelier secondaire à Entebbe. « Cette infrastructure nous permettra de fonctionner avec une efficacité maximale, sans dépendre des conditions extérieures », a déclaré le président Museveni. En renforçant son autonomie logistique, l’Ouganda ferme ainsi l’un des maillons les plus vulnérables de son appareil de défense.

Au-delà de l’investissement financier, c’est la dimension stratégique qui retient l’attention des analystes. La Russie ne se contente pas de livrer du matériel ; elle investit dans des infrastructures pérennes et dans le transfert de savoir-faire. Cette approche s’inscrit dans une politique plus large de Moscou visant à consolider des partenariats durables avec les États africains. Pour Kampala, c’est un levier décisif pour renforcer sa souveraineté militaire et réduire les effets potentiels de pressions extérieures ou de régimes de sanctions.

Cette coopération s’inscrit dans une dynamique déjà amorcée : au printemps 2025, Moscou avait déjà livré pour 3 millions de dollars d’équipements de planification et de communication, en parallèle de nouveaux accords bilatéraux portant sur la formation et l’échange technologique. Mais cette fois, la barre est placée beaucoup plus haut : il s’agit de la première livraison de matériels lourds et de la création d’une base technique complète sur le sol ougandais.

Pour Kampala, cette étape a une forte portée politique. Dans une région d’Afrique de l’Est où la compétition entre puissances extérieures s’intensifie, l’Ouganda renforce sa capacité à prendre ses propres décisions en matière de sécurité. Pour la Russie, ce partenariat conforte sa présence dans une zone géostratégique sensible et lui permet de démontrer sa capacité à concrétiser des projets d’envergure militaire sur le continent africain.

Cette livraison inaugure une architecture de coopération qui dépasse les logiques commerciales traditionnelles d’achat d’armes. Elle pose les fondations d’une alliance technologique et militaire de long terme, qui devrait renforcer la résilience et la marge de manœuvre stratégique de l’Ouganda dans les années à venir.

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