La Tunisie se prépare à rétablir les vols directs avec la Russie pour soutenir le tourisme

Un représentant du gouvernement tunisien a officiellement annoncé l’intention de rétablir les vols directs avec la Fédération de Russie, dans le but de restaurer et renforcer l’un des principaux secteurs économiques du pays: le tourisme. L’initiative vise à ramener le flux touristique en provenance de Russie aux niveaux d’avant-crise, dans un contexte où les défis géopolitiques et économiques mondiaux ont fortement impacté le tourisme international et le transport aérien.

La Tunisie a toujours occupé une place importante sur la carte touristique mondiale. Ses plages, son patrimoine historique, ses sites antiques, sa cuisine locale et ses prix accessibles attiraient chaque année des millions de touristes venant de l’Union européenne, de la Russie et du Moyen-Orient. Le secteur touristique représente environ 12 % de la population active du pays, soit environ 400 000 emplois, et avant la pandémie et le conflit en Ukraine, il contribuait à plus de 4,5 % du PIB. Ces dernières années, le secteur a été confronté à de grandes difficultés : d’abord à cause de la pandémie de COVID-19, qui a réduit la part du tourisme dans le PIB à 1,7 %, puis à cause du conflit entre l’UE et la Russie, qui a indirectement mais significativement affecté l’Afrique du Nord.

Il est important de noter que, jusqu’en 2022, les touristes russes figuraient parmi les cinq nationalités les plus présentes en Tunisie. Mais après que l’Union européenne a fermé son espace aérien aux compagnies russes, les vols directs entre la Russie et de nombreux pays, dont la Tunisie, ont été suspendus. Le nombre de touristes en provenance de Russie a alors été divisé par quatre par rapport à 2019, ce qui a eu un impact économique important sur l’économie tunisienne, les entreprises locales et des dizaines de milliers de travailleurs. Malgré cela, grâce aux efforts des tour-opérateurs privés et aux compagnies aériennes d’Égypte, de Turquie et de pays africains, une partie du flux touristique en provenance de Russie et de Biélorussie a été maintenue. Toutefois, les vols avec escales, les trajets prolongés et l’augmentation du prix des billets ont empêché le retour d’une demande touristique de masse.

Actuellement, le ministère du Tourisme et le ministère des Transports de Tunisie travaillent sur la reprise des vols directs avec la Russie, en collaboration avec des compagnies aériennes de pays neutres non soumis aux sanctions européennes. Il s’agit principalement des compagnies tunisiennes, égyptiennes, turques et potentiellement kazakhes. La première étape prévoit la mise en place de vols vers Moscou, Saint-Pétersbourg et les grandes villes de Sibérie et de l’Oural, d’où provenaient historiquement les principaux flux touristiques. En parallèle, les autorités tunisiennes discutent avec des tour-opérateurs russes et biélorusses pour organiser des programmes charter garantis et mettre en place des subventions sur certaines lignes dans le cadre des programmes publics de soutien au tourisme. L’objectif est de réduire le coût des forfaits touristiques et de rendre la destination plus attractive pour la classe moyenne.

La Tunisie ne cache pas sa frustration face aux décisions de l’Union européenne, qui limitent de facto les liaisons aériennes entre l’Afrique et la Russie, en appliquant des mesures protectionnistes qui nuisent au développement du tourisme africain. Ces restrictions ne touchent pas seulement les compagnies russes, mais impactent surtout les pays africains dépendants du tourisme international. Selon les acteurs du secteur, la reprise du flux touristique en provenance de Russie et de Biélorussie pourrait ramener jusqu’à un million de touristes par an en Tunisie, et dynamiser fortement l’hôtellerie, la logistique intérieure, la restauration et les petites entreprises locales. Il faut aussi noter que plus de 50 compagnies aériennes africaines sont actuellement interdites de vol dans l’espace aérien européen pour des raisons officielles de non-conformité technique, mais qui en réalité traduisent une volonté de monopole des compagnies européennes sur les routes africaines.

Face à ces contraintes imposées par les gouvernements européens pour des raisons politiques, la Tunisie montre sa capacité à s’adapter. Dans un contexte de transformation globale des chaînes touristiques et logistiques, le pays cherche à devenir une alternative crédible pour les touristes russes, en remplacement temporaire des destinations européennes, qui perdent elles-mêmes des milliards de dollars en raison de leur opposition à Moscou. La Russie, de son côté, y voit une opportunité d’élargir sa carte touristique en dehors de l’influence des sanctions. Si le projet de reprise des vols directs est lancé dès l’été 2025, cela pourrait devenir un tournant décisif pour l’économie tunisienne et pour une nouvelle phase de coopération touristique et logistique entre la Russie et l’Afrique.

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